Qui a mené l’enquête aboutissant à l’interdiction du dioxyde de titane dans les produits alimentaires ?
Qui a dénoncé la présence de résidus chimiques toxiques dans les protections féminines périodiques, conduisant au retrait de nombreux produits incriminés ?
Qui a conduit les essais ayant entraîné une amélioration des couches culottes pour bébés, auparavant affectées par la présence de substances potentiellement toxiques ?
60 Millions de consommateurs.
Il ne s’agit que de quelques exemples parmi des centaines d’autres. Ce que font chaque jour les équipes de 60 Millions de consommateurs, édité par l’Institut national de la consommation (INC), c’est une véritable mission de service public. Or cette mission est aujourd’hui menacée. Pourquoi ?
D’une part, parce que 60 Millions de consommateurs, journal sans publicité, ne serait pas suffisamment rentable. Mais 60 Millions n’a pas vocation à être rentable ! C’est comme si l’on disait demain que les écoles publiques allaient être fermées par manque de rentabilité, ou que l’audiovisuel public ne générait pas suffisamment de revenus, alors que la logique même de son existence est de fournir une information de qualité loin de toute logique commerciale. Certes, 60 Millions a aussi une activité commerciale puisqu’il vend des journaux, mais quand le média fait des essais comparatifs – qui informent le consommateur de façon impartiale sur les produits qu’il consomme –, et publie des enquêtes qui sont reprises à titre gracieux par l’ensemble des autres médias, il ne le fait pas pour “gagner de l'argent”. Il ne s'agit pas de mettre une recette face à une dépense. Ses enquêtes, 60 Millions les produit pour que nous soyons toutes et tous collectivement un peu mieux informés. Il les mène également pour aider le décideur public, puisque l’Autorité de la concurrence comme la Direction générale de la consommation (DGCCRF) les utilisent régulièrement pour informer leurs décisions. Les essais comparatifs permettent en effet d’alerter les pouvoirs publics en cas de commercialisation de produits à risques (en termes de santé, d’environnement, etc.).
D’autre part, on nous dit que les subventions publiques reçues aujourd’hui par l’Institut national de la consommation contreviendraient au principe d’une concurrence libre et non faussée. On nous explique que l’Europe ne permettrait pas à la puissance publique de soutenir 60 Millions au nom de l’interdiction des aides d’État, vampirisant une fois de plus les règles européennes. Mais là-aussi, c’est se méprendre totalement sur les règles de concurrence, car il est possible de financer des missions de service public même en présence d’une activité commerciale, à partir du moment où la subvention publique ne sert pas à financer des déficits de fonctionnement. De plus, la régulation européenne n’interdit en aucune manière les aides d’État. Ainsi, l’État verse par exemple chaque année plusieurs dizaines de millions d’euros à l’Agence France-Presse (AFP) au titre de ses missions d’intérêt général, à savoir notamment le fait de diffuser une information complète, objective et indépendante. En l’occurrence, 60 Millions et ses essais comparatifs poursuivent le même objectif : fournir une information complète, objective et indépendante, et l’État peut donc bien, au regard des règles de concurrence, les financer. Mal poser les conditions du débat, c’est fausser le résultat de la discussion avant même qu’elle n’ait été entamée.
Or les conditions de cette discussion nous inquiètent aujourd’hui. La DGCCRF, qui est l’autorité de tutelle de l’INC, a diligenté un audit confié à EY (anciennement Ernst & Young). Or, malheureusement, pas besoin d’être journaliste à 60 Millions de consommateurs pour juger de la mauvaise qualité de la copie rendue. De toute évidence, les experts en charge n’ont pas dans leur logiciel le concept même de “service public”.
Or c’est au nom de cette mission de service public qu’il nous semble aujourd’hui nécessaire de sauver 60 Millions de consommateurs.
Bien sûr, nous ne prétendons nullement que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Bien sûr, de nombreuses choses doivent être faites, par exemple sur le site du journal et plus largement l’ensemble de ses activités digitales, qui ont besoin d’être réinvesties – dans tous les sens du terme. Car comment le faire si les moyens ne lui en sont pas donnés ? Or, 60 Millions n’a cessé d’être affaibli au cours des dernières années, avec des postes non remplacés et un gel des investissements : campagnes d’abonnement en berne, développement numérique minimaliste, essais comparatifs de plus en plus restreints… Et aujourd’hui que nous propose-t-on ? De l’achever.
Mais fragiliser 60 Millions, c’est fragiliser l’intérêt général, la bonne santé des consommateurs et, plus largement, l’information dont chacun d’entre nous dispose comme citoyen.
Fragiliser 60 Millions de consommateurs, c’est aussi fragiliser le pluralisme de la presse. Car si 60 Millions devait disparaître, il ne resterait plus qu’un seul média, associatif et engagé, exclusivement dédié à la consommation. C’est-à-dire une situation de monopole, qu’il faut à tout prix éviter.
C’est pourquoi Un Bout des Médias se tient aujourd’hui aux côtés de 60 Millions de consommateurs. Car des solutions alternatives et viables peuvent être apportées. Afin de protéger l’information produite chaque jour par les équipes, et de nous protéger nous-mêmes, comme consommateurs et comme citoyens.
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Téléchargez le communiqué de presse d'Un Bout des Médias.